CHAPITRE IV
Manière de méditer la Passion
VENDREDI
Méditation sur le crucifiement et les sept dernières paroles de Notre-Seigneur
En ce jour, vous contemplerez le mystère de la Croix, et vous méditerez les sept dernières paroles de Notre-Seigneur.
Réveille-toi maintenant, ô mon âme, et commence à penser au mystère de la sainte Croix dont le fruit a réparé le mal que nous avait fait le fruit empoisonné de l'arbre défendu. Vois d'abord ce qui se passe dès que le Sauveur est arrivé au lieu du supplice. Afin de rendre sa mort plus honteuse, ses pervers ennemis le dépouillent de tous ses vêtements, lui enlevant jusqu'à sa tunique intérieure, laquelle depuis le haut jusqu'en bas n'était qu'un seul tissu, sans aucune couture. Considère avec quelle douceur ce très innocent Agneau se laisse déchirer sans ouvrir la bouche ni dire une seule parole contre ceux qui le traitent ainsi ; c'était au contraire de bon cœur qu'il consentait à être dépouillé de ses vêtements, et à subir toutes les hontes de la nudité, afin de couvrir par ses propres vêtements, bien mieux qu'avec les feuilles du figuier, la nudité où nous étions tombés par le péché de nos premiers pères.
Quelques docteurs disent que pour enlever au Seigneur cette tunique, on commença par lui arracher avec une grande cruauté la couronne d'épines qu'il avait à la tête, et que quand on l'eut dépouillé, on la lui remit en enfonçant une seconde fois les épines jusqu'au cerveau, ce qui dut lui causer une indicible souffrance. Il est à croire que ses bourreaux usèrent envers lui de cette cruauté, eux qui lui en firent subir tant d'autres et de si inhumaines dans le cours de sa passion ; que ne nous donne pas à entendre l'Évangéliste quand il dit qu'ils firent de lui tout ce qu'ils voulurent ? Comme la tunique était collée aux plaies reçues à la colonne, que le sang en était déjà glacé et ne formait qu'un même tissu avec elle, quand ils voulurent l'en dépouiller, ces cruels, sans entrailles, sans compassion, la lui arrachèrent d'un coup et avec tant de violence, qu'ils rouvrirent et renouvelèrent toutes les plaies de la flagellation ; de telle sorte que le saint corps resta de toutes parts ouvert, privé de son harmonie naturelle, et changé tout entier en une grande plaie qui, de tous côtés, laissait couler du sang.
Considère ici, ô mon âme, la hauteur de la bonté et de la Miséricorde de Dieu, qui dans ce mystère, resplendissent d'une manière si visible. Vois comment celui qui revêt le ciel de nuages, et les champs de fleurs et de beauté, se trouve ici dépouillé de tous ses vêtements. Imagine quel froid dut souffrir ce saint corps, étant, comme il était, tout sillonné de blessures. Non-seulement ses habits lui ont été arrachés avec violence, mais sa chair même a volé en lambeaux sous les coups redoublés des verges. De la tête aux pieds, ce ne sont que des plaies ouvertes. Saint Pierre, avec ses vêtements et sa chaussure, avait souffert du froid la nuit précédente ; combien plus dut le sentir ce corps si délicat, entr'ouvert par tant de blessures, et sans aucun vêtement ! (...)
Source : Œuvres Spirituelles de Saint Pierre d'Alcantara (livres-mystiques.com)
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde