1 - La vision des sens, (visio sensibilis). Les évènements vus se trouvent extérieurement dans l'espace. Toutes les personnes présentes les voient (soleil de Fatima par exemple). Cependant, ces visions ne sont pas purement objectives car l'objet est connu à travers le filtre des sens, qui le traduisent.
2 - La perception intérieure (visio imaginativa). Cette vision fait appel aux "sens internes". L'âme est rendue capable de voir le non-sensible, le non-visible par les sens, mais les objets sont réels, bien qu'ils n'appartiennent pas à notre monde sensible habituel.
3 - La vision spirituelle (visio intellectualis). Cette vision intellectuelle est sans images, comme on le trouve dans les hauts degrés de la mystique.
Maria Valtorta a bénéficié de visions principalement du type intermédiaire. Une vision qui sollicite les sens internes ouverts sur une réalité qui ne nous est pas directement accessible. Bernadette Soubirous voit et entend réellement la Vierge Marie, mais il faut passer par l’intermédiaire de sa narration – et de notre libre foi – pour la rejoindre.
Cette articulation peut poser problème car la narration fait intervenir l’humain qui relate et se souvient. C’est pourquoi Jésus nomme "instrument" les personnes qui, comme Maria Valtorta, se dépouillent d’elles-mêmes pour laisser le Christ vivre en elles.
Thérèse Neumann a vu réellement les scènes de la Passion et quelques autres. Dans ses extases, elle parlait araméen, allant jusqu’à corriger un professeur. Elle demandait à ce qu’un spectateur s’écarte pour mieux voir une scène, mais elle n’eut pas pour vocation de raconter ce qu’elle voyait : seulement témoigner de la réalité de la Passion.
Maria d’Ágreda et Anne-Catherine Emmerich ont eu des visions authentiques, mais l’intervention humaine malencontreuse les a déformées : les hommes ont voulus "perfectionner la perfection", selon le commentaire de Jésus à Maria Valtorta[19].
La valeur unique des visions de Maria Valtorta tient à ce qu’elles sont complètes et consignées par écrit immédiatement et par la voyante elle-même : le lecteur est donc au plus proche de la source ou de ce qu’elle appelle "l’Auteur divin".
Les différents degrés de reconnaissance par l'Église.
Quel qu'en soit la forme de la révélation privée, l'interprétation en revient à l'Église qui peut se prononcer de trois façons sur son authenticité :
1 – par un constat explicite de surnaturalité : l'autorité ecclésiastique compétente constate la composante surnaturelle de la révélation privée. Elle est alors officiellement reconnue, dans le cadre rappelé ci-dessus (foi humaine et non certitude divine).
2 – par un constat explicite de non-surnaturalité. L'autorité ecclésiastique compétente constate qu'il n'y a pas de composante surnaturelle de la révélation privée Elle est alors officiellement non reconnue au regard de sa surnaturalité.
3 – par un non-constat de surnaturalité. L'autorité ecclésiastique compétente ne se prononce pas alors soit parce qu'elle choisit de ne pas le faire soit parce qu'elle ne le juge pas opportun pour le moment. C’est le cas très majoritaire des révélations privées.
Ainsi donc, ce n'est pas parce qu'une révélation privée n'est pas reconnue, qu'elle n'est pas authentique. On joue parfois, sciemment et dans un but polémique, sur l’ambiguïté du terme : "n'est pas reconnue" qui peut se comprendre comme "n'est pas (encore) reconnue" ou "n’est pas reconnue (donc condamnée)".
Dans son livre sur les révélations privées[20] , Mgr Laurentin notait :
"Les commissions qui ont à juger de l’authenticité des voyants, concluent généralement : "ce n’est pas surnaturel". Cette conclusion serait diffamatoire dans la mesure où elle semble dire que ces voyants ne sont pas surnaturels, car surnaturel signifie "riche de la grâce du baptême et fidèle à cette grâce". Hors la plupart le sont au plus haut point…
"L'erreur courante en ce domaine, est qu'on entend "surnaturel" au sens de "miraculeux", extra-ordinaire, hors du commun : ce qui n’est pas le cas de la grâce : "Les apparitions et révélations de tel voyant ne sont pas miraculeuses !". Il n'y a aucune exception aux lois de la nature, il n'y a rien de préternaturel, mais leur vie dans l'Esprit n'en est pas moins surnaturelle. Elle les élève, les éclaire, les transfigure à bien des titres."
Dans son commentaire du secret de Fatima, le Cardinal Ratzinger concluait :
"Le critère pour la vérité et pour la valeur d'une révélation privée est donc son orientation vers le Christ lui-même. Saint Paul écrit : "N'éteignez pas l'Esprit, ne méprisez pas les prophéties, mais discernez la valeur de toute chose, ce qui est bien, gardez-le"[21]. À toutes les époques est donné à l'Église le charisme de prophétie, qui doit être examiné, mais ne peut être déprécié[22]".
Le piège dans lequel on tombe souvent, convaincu de constituer à soi tout seul un rempart pour la défense de l’Église, est que l’on examine une révélation privée, non en cherchant le bien, comme le demande saint Paul et l’Église, mais en y cherchant le mal, ce qui ne procède pas du regard du Christ sur l’humanité.
Le cas de Maria Valtorta.
L’opprobre de la mise à l’Index qui a frappé l’œuvre de Maria Valtorta il y a plus de 50 ans, a été juridiquement balayé. La liste des cautions morales sur laquelle figure désormais des Papes, des théologiens, des biblistes, des saints et des bienheureux, etc. écarte tout soupçon qui pourrait peser sur l’œuvre.
Elle échappe désormais à deux attitudes également répréhensibles :
"interdire" la lecture des œuvres de Maria Valtorta au nom d’une proscription dépassée,
"imposer" cette lecture comme substitutive des Évangiles.
Elle demeure sous la coupe de la décision fondatrice de Pie XII[23] :
"Publiez l’œuvre tel quelle. Il n’y a pas lieu de donner une opinion quant à son origine, qu’elle soit extraordinaire ou non. Ceux qui liront comprendront".
Le pape encourageait ainsi la publication d’une œuvre qu’il estimait importante, en invitant chacun à se forger intuitivement son jugement.
Le Bienheureux Gabrielle Allegra, traducteur de la Bible en chinois définissait ainsi la place de l’œuvre de Maria Valtorta qu’il affectionnait :
"L'Église peut tacitement ou publiquement reconnaître que certaines révélations privées peuvent être utiles pour la connaissance et la pratique de l'Évangile et pour la compréhension de ses mystères et, par conséquent, elle peut les approuver dans une forme négative en déclarant que les révélations ne sont pas, dans leurs termes, contraire à la foi. Ou elle peut les ignorer officiellement, laissant à ses enfants la pleine liberté de former leur propre jugement".
"Dans cette forme négative, les révélations de Sainte-Brigitte, de Sainte Mathilde, de Sainte Gertrude, de la Vénérable Marie de Agreda, de Saint-Jean Bosco et de nombreux autres saints ont été approuvés".
Que peut attendre un lecteur d’une telle œuvre ?
Pour répondre à cela, il convient de se tourner vers les témoignages de lecteurs :
Ce qui frappe tout d’abord est le sentiment d’être transporté, à travers le temps et l’espace, dans un pèlerinage à la suite de Jésus : Jésus se fait présent.
Cette lecture captivante peut se transformer en rencontre bouleversante : les lettres qui témoignent d’un retour à Dieu, voire d’une conversion, ne sont pas rares. Certains y ont trouvés leur vocation.
Comme toute œuvre inspirée, elle se lit et relit avec une profondeur et une amplitude renouvelée à chaque fois.
Elle explicite des détails de l’Évangile mentionnées expressément mais souvent inaperçus : la présence de disciples au calvaire avec les saintes femmes, la retraite préparatoire à la Passion en Samarie, etc.
Elle confirme l’authenticité d’épisodes que certains croient plus symboliques que réels, comme le jeune Jésus tenant tête aux docteurs du Temple.
Elle restaure la signification d’épisodes oubliés comme le sabbat "second-premier" de Luc 6, 1 que beaucoup de Bibles passent sous silence ou mentionnent sans expliquer.
Elle révèle la profonde signification de certains épisodes qu’on explique mal comme celui de la mère cananéenne éplorée que Jésus ignore puis traite de "petit chien", à l’opposé complet du Christ doux et humble de cœur que l’on connaît par ailleurs.
Elle permet de comprendre l’itinéraire trop humain de Judas entraîné vers sa trahison et son déicide ou celui de la rédemption qu’empreinte Marie de Magdala
Elle éclaire le fait que Jésus, condamné par le Sanhédrin, ait pu séjourner à Béthanie tout proche du Temple, sans être inquiété, ou qu’il célèbre la Pâque en plein Jérusalem, au Cénacle sans qu’on l’arrête.
Elle apporte une réponse pertinente à certaines questions que les historiens de tous temps se sont posés : Comment Rome a-t-il pu être évangélisé en si peu de temps par un pêcheur galiléen ? Comment la Gaule a-t-elle pu être si vite christianisée sans référence à un apôtre comme tous les autres pays ?
Elle offre enfin une mine inépuisable à l’étude théologique et scientifique que les études parues récemment ont commencées à explorer.
Etc.
Dans une dictée à Maria Valtorta, Jésus avait précisé la place de l'œuvre par rapport à l'Evangile :
"L’ouvrage livré aux hommes par l’intermédiaire de Maria Valtorta n’est pas un livre canonique disait Jésus. Néanmoins, c’est un livre inspiré que je vous accorde pour vous aider à comprendre certains passages des livres canoniques, et en particulier ce que fut mon temps de Maître, pour que vous me connaissiez par mes paroles, moi qui suis la Parole[24].
Autant de découvertes auxquelles invite la phrase de Pie XII : Qui lira, comprendra.
François-Michel Debroise
3 mars 2012.
Mis à jour le 4 novembre 2016.
ou voir ici :
www.maria-valtorta.org/ValtortaWeb/MariaValtorta15.htm