Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More

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ami de la Miséricorde -  2017-08-02 22:53:52

Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More

XIV. LA MANIE DU SCRUPULE

ANTOINE : (...) Voilà comment la mère Maud nous racontait ces deux confessions. Voyons maintenant comment l'âne et le loup ont, chacun de son côté, accompli leur pénitence. Le pauvre âne affamé, vit une truie et ses porcelets confortablement installés sur de la paille fraîche. Il s'approcha avec l'envie d'en manger quelques fétus, mais sa conscience scrupuleuse se mit à le tourmenter. La pénitence lui interdisait de faire tort à qui que ce fût par gourmandise, or s'il prenait, ne fût-ce qu'un brin de paille, l'un ou l'autre de ces petits porcelets pourrait bien prendre froid. Il resta sur sa faim jusqu'à ce qu'on lui apportât sa ration de son. Il allait se jeter dessus quand il lui vint un nouveau scrupule. Il se dit qu'en mangeant ce son il désobéirait à son confesseur, car il risquait de priver un autre animal qui pourrait être affamé lui aussi. Il jeûna donc jusqu'à ce que son confesseur le renseignât mieux. Alors, il rejeta ce scrupule, mangea ses repas sans arrière-pensée et mena dans la suite une longue et honnête existence.

Le loup, lui, quitta le confessionnal, dûment absous. Il avait le même état d'esprit qu'une femme malicieuse de ma connaissance, qui sortant du tribunal de la pénitence dit à son mari : « Me voilà bien confessée, Dieu merci ! Maintenant que j'ai renoncé à mon ancienne malice, je puis recommencer à loisir. »

VINCENT : Vraiment, mon oncle, pouvez-vous lui prêter ces paroles ? Je l'ai entendue moi-même. Elle parlait en plaisantant, pour faire rire son mari.

ANTOINE : Elle avait l'air en effet de parler à moitié en plaisantant. Elle plaisantait quand elle disait renoncer à sa malice. Mais quand elle affirma qu'elle allait recommencer à loisir, son mari vit bien qu'elle parlait sérieusement.

VINCENT : Eh bien ! Je lui raconterai ce que vous dites d'elle !

ANTOINE : Vous pouvez le lui répéter.

Revenons-en au loup. Il s'était déchargé par la confession de son brigandage mais la faim revint bientôt, et il fit comme cette femme pleine de malice dont je vous parlais tout à l'heure : il recommença. Pourtant, sa conscience le freinait. Il ne voulait pas désobéir à son confesseur en prenant un repas de plus de cent sols.

Un jour qu'il rôdait à la recherche d'une proie, il vit dans un pré deux chevaux maigres et boiteux. Le premier tenait à peine sur ses pattes, le second était déjà mort et dépouillé de sa peau. Le premier mouvement du loup fut de se jeter sur ces misérables carnes. Mais alors, il aperçut, dans un pré voisin, une belle vache avec son veau. Il soupira : « Hélas ! pauvre de moi ! J'allais désobéir à mon confesseur sans même y prendre garde. Voilà un cheval mort, dont j'ignore le prix, car, au marché, onques ne vis vendre un cheval mort, et je ne sais pas le moins du monde ce qu'il peut valoir. (...)

Source : livres-mystiques.com

Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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