Aucun acte en soi ne peut valoir, seule l'intention valide, donne sa valeur

Le Forum Catholique

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Glycéra -  2017-05-20 00:27:20

Aucun acte en soi ne peut valoir, seule l'intention valide, donne sa valeur



Il me semble ainsi que :

- garder au coeur l'idée qu'un camion fou éliminera de la terre le malfaisant... est un désir malsain, pas sain, pas saint. C'est à Dieu qu'il faut laisser le choix de l'heure, donc du moyen.

- si d'autres victimes subissent, ne retombe-t-on pas dans le texte du père Molinié * : aimer Jésus crucifié, parce que c'est ce qu'Il veut, aussi peu vraisemblable que cela paraisse à nos tripes ? Dieu sait ce qu'il fait, et ce qui arr *ive à chacun : toujours la meilleure soupe pour être mis dans de bonnes conditions de conversion, et de pratique vitale.

- si l'offensé ne s'est pas rendu compte du désastre, ni de sa responsabilité, donc pas de sa faute, comment demandera-t-il pardon consciemment ? Certes, mais cela nous empêche-t-il de le donner par dessus cela, à l'exemple de Dieu qui le fait ? La suite des circonstances ne dépend pas (pas beaucoup) de nous.

- faire du bien, rendre un service est une acte. N'importe qui peut le faire, même un zombie, cela n'est pas la conscience nécessaire à donner le pardon. Ou alors celui de Dieu n'aurait pas grande valeur...
Il faut rendre ce service en conscience de vouloir faire du bien, même si c'est avec grande douleur, et surveillance de soi.


Une anecdote qui m'a touchée au plus profond : celle d'une dame que j'ai connue, bonne de curé de son "petit" frère prêtre, amie de mes grand-parents. Voici ce qu'elle nous a dit :

Un village comme d'autres dans le Midi, (style Oradour); un camion attaqué par des maquisards et une vengeance immédiate des soldats allemands attaqués. Toute sa famille y passe, elle voit ses filles violées, on leur tire dessus... et on les emporte à l'hôpital quand la troupe est partie. Elle est très longue à guérir, apprend que son mari n'a pas réussi à s'en sortir, et peine à reprendre sa vie de jeune femme. Un jour passe un pèlerin, qui est accueilli pour une étape, comme souvent d'autres au presbytère.
Il raconte, ancien soldat, qu'il veut trouver la paix de l'âme, et va vers St Jacques. Un ou deux détails... et elle tremble... vous aurez compris ce que Dieu a fait là... Durant tout le repas, elle garde les dents serrées, et les yeux troublés d'une infinie douleur. Mais elle sert le repas, comme aux aures.
- Oh, Madame, dit-elle à ma grand'mère, oh Madame, j'ai avalé cette sale couleuvre, je l'ai avalée, mais que c'est dur ! Maintenant le Seigneur va sûrement mieux m'accorder ce que je lui demande ! Car c'est fait. Depuis le temps...
Voilà dans ses mots de paysanne, grand coeur, et langue directe, ce que j'ai entendu.

Jamais plus pensé,au pardon comme à une chose théorique, lointaine et facile ! C'est dans les tripes, et Dieu le sait. Souvent repensé à elle.



--- Une note aussi, encore du père Molinié : une émission de télé l'avait marqué. Des victimes d'Auschwitz avaient témoigné, et on les interviewait : que serait pour vous la sanction de ces bourreaux ? Et un brave cafetier, peu éduqué, a répondu tout purement : - qu'ils se rendent compte de ce qu'ils ont fait ! Moyen radical de se trouver devant le choix, comme les anges : révolte ou conversion ? Nul ne peut obliger qui que ce soit ni à se rendre compte, ni à changer de vie...


Ce n'est pas le déjeuner, ni la chambre offerte qui ont valu, c'est son intention d'y arriver sans rien dire, sans un froncement de cil, à ce pélerin ... dont le frère curé s'est occupé avec une attention particulière pour la soulager le plus possible.


Qu'il est dur de ne pouvoir se réconcilier avec quelqu'un qui n'entend même pas la demande ! Pardonner, et voir le mur s'installer... en tout amnésie/inconscience/malveillance/incapacité Qui sait ? Dieu sait !
Et il sait aussi la peine que nous portons, car c'est Lui qui est encore plus peiné que nous ! Nous avons toujours une consolation : celle de faire déjà une portion de notre purgatoire, car nous, nous avons des fautes, et des réparations à faire !


Une prière, dans un vieux livre de piété :

"Esprit-Saint, consolateur, toit qui me connais mieux que moi-même, je te prie de m'aider à mieux savoir ce que je fais, et à me rendre compte des fautes que je n'ai pas vues, pour que je ne les reproduise plus, et ne nuise plus à autrui, ni à mon âme !"

Faiblesse, et pitié du coeur de l'homme...

Voilà ce que me semble, en pratique, dans le coeur, du pardon.

Glycéra




* le texte, dont j'ai transcrit des miettes, qui parlait de notre engagement dans la vie, laissant là les modalités de ceux qui veulent un monde sans Jésus crucifié, et déraillent donc dans leurs propos en politique.
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