Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More

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ami de la Miséricorde -  2017-08-17 22:52:12

Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More

XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE

VINCENT : Je pense, mon oncle, que le diable a plus d'un tour dans son sac pour faire tomber les hommes dans ce triste état d'esprit.

ANTOINE : C'est bien vrai, mon neveu. Le démon saisit toutes les occasions. Parfois, c'est par la fatigue : les gens sont lassés d'eux-mêmes après quelque lourde perte ; certains autres par la crainte de quelque douleur physique et d'autres, comme je vous l'ai dit, par crainte de quelque déshonneur. J'ai connu moi-même un homme qui jouissait de l'estime de tous, mais un jour il se mit en tête qu'il avait perdu cette estime, il n'en dit rien à personne d'autre, mais il me confia à moi ce qui le torturait. Il était poursuivi par l'idée que les gens ne l'estimaient plus, qu'on n'appréciait plus son esprit comme avant, que maintenant on le prenait pour un imbécile. En fait, il se trompait, on le tenait toujours pour un homme capable et honnête.

J'en ai connu deux autres qui vivaient dans la crainte du suicide. Ils n'auraient pu dire pour quelle raison ils l'auraient commis, mais cette pensée les hantait. Ils n'avaient subi aucune perte, ils n'avaient pas à craindre le mépris de leurs semblables ; l'un d'entre eux était même agréable à regarder, mais tous deux étaient obsédés par cette pensée. Ils se disaient que pour rien au monde ils n'en arriveraient à se supprimer de leurs propres mains, mais pourtant ils craignaient sans cesse de le faire. Pourquoi cette crainte ? Aucun des deux n'eût pu le dire. L'un des deux demanda à l'un de ses amis de le charger de liens.

VINCENT : Comme c'est étrange !

ANTOINE : Je suppose que beaucoup d'entre eux sont aussi peu raisonnables. Le démon, comme je vous l'ai déjà dit, est toujours à l'affût. Saint Pierre dit : « Votre ennemi, le diable, tel un lion rugissant, cherche qui il peut dévorer »(1 P., 5, 8).

Il remarque bien dans quel état chaque homme se trouve et il n'observe pas seulement les signes extérieurs : biens, richesses, fortune, pouvoir, bonne ou mauvaise réputation, mais aussi les choses plus profondes : la santé, la maladie, la bonne et la mauvaise humeur, la joie, le chagrin, la force et la faiblesse d'âme, la hardiesse et la timidité ; dès que l'une ou l'autre de ces caractéristiques lui en donne l'occasion, il apprête le piège de la tentation. S'il voit des gens enclins à se laisser entraîner aux plaisirs de la chair, son piège sera la volupté ; s'il en voit qui sont portés à se mettre facilement en colère, c'est par là qu'il essayera de les faire choir ; de même s'il en rencontre qui ont l'âme mélancolique, qui sont portés à la crainte, il utilisera ce tempérament pour les faire tomber dans le péché, il leur mettra dans l'esprit des pensées si épouvantables que sans l'aide de Dieu ces malheureux ne pourraient jamais s'en débarrasser. Une pensée horrible peut susciter une vertueuse répulsion. Mais il se peut aussi, par la puissance et l'astuce du démon qui utilise à son profit les caractères craintifs, que cette pensée provoque en l'âme qui l'a conçue le désespoir, la certitude d'avoir été abandonnée par Dieu. Alors que le simple fait de ne s'être jamais complu dans cette idée, de l'avoir toujours combattue suffit pour qu'il n'y ait pas péché, mais au contraire source de vaillance et de mérite.

Source : livres-mystiques.com

Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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