Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More

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ami de la Miséricorde -  2017-08-29 00:16:18

Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More

XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES

(...) Et, bien que Notre-Seigneur, par l'exemple du chameau (ou du câble), ait montré qu'il est non seulement difficile, mais impossible à un riche d'entrer dans le royaume des cieux, il assure pourtant que, si c'est impossible pour des hommes, ce ne l'est pas pour Dieu, car « pour Dieu, tout est possible » (Mt., 19, 26 ; Mc., 10, 27). Mais, d'autre part, il décrit le genre de riches qui ne peuvent aller dans le royaume des cieux, disant : « Mes enfants, comme il est difficile à ceux qui s'attachent à l'argent d'entrer dans le royaume de Dieu ! » (Mc., 19, 24).

VINCENT : C'est très vrai, mon oncle. À Dieu ne plaise qu'il en fût autrement, car si tout riche courait un tel danger, le monde serait dans un bien triste état !

ANTOINE : Effectivement, mon cher neveu, je crains qu'il ne soit dans un triste état, car bien peu de gens ne désirent pas être riches, et, parmi ceux qui subissent l'attrait des richesses, il y en a bien peu qui ne s'y attachent passionnément.

VINCENT : Je crains bien que vous n'ayez raison, mon oncle. Mais ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Voici ce que je désirais vous dire. Je ne puis comprendre (le monde étant ce qu'il est et si rempli de gens pauvres), je ne puis comprendre comment un riche peut rester riche sans danger de se damner.

Il a tout le temps sous les yeux des pauvres, à qui il manque ce que lui pourrait leur donner. Or, il est tenu de soulager leur misère, puisqu'il le peut. Saint Ambroise va même jusqu'à dire que laisser mourir quelqu'un sans le secourir équivaut à l'avoir tué. Je ne puis m'empêcher de voir que tout homme riche doit craindre très fort d'être damné, je ne vois pas comment il peut être sauvé aussi longtemps qu'il conserve ses biens. Il pourrait le faire s'il n'y avait des pauvres, il conserverait la faveur de Dieu, comme Abraham, et beaucoup d'autres riches qui dans la suite ont été des hommes vertueux, mais étant donné la grande quantité de pauvres qu'on trouve dans tous les pays, un homme qui garde par devers lui quelque bien doit nécessairement s'attacher beaucoup à la richesse, puisqu'il ne donne pas ses biens aux pauvres comme la charité lui en fait un devoir.

Il me semble, mon oncle, que vos paroles de réconfort s'adressant aux riches qui se font des scrupules et craignent la damnation, ne peuvent guère être utiles.

ANTOINE : Il est souvent difficile, mon cher neveu, de juger une chose sans tenir compte des circonstances. Saint Augustin raconte l'histoire d'un médecin qui administra à un malade un certain médicament qui le soulagea. Le même malade, atteint une seconde fois de la même maladie, reprit lui-même de ce médicament sans l'avis du docteur. Cette fois, le médicament lui fit plus de mal que de bien. Il le raconta au médecin et lui demanda comment c'était possible. « Ce médicament, répliqua le praticien, ne te fit aucun bien, parce que tu le pris sans que je te l'ordonnasse ! » Saint Augustin approuve cette réponse car, si le remède était pareil, la maladie, elle, pouvait présenter des aspects différents de la première fois sans que le malade en fût conscient. Bien des facteurs pouvaient intervenir que le docteur eût perçus et en raison desquels il n'eût pas donné le même médicament que la première fois.

Et ce qui concerne ce démon nommé « trafic », il serait vraiment long de passer en revue les circonstances qui devraient être examinées et pesées. Mais je parlerai un peu de ce que vous avez demandé, ensuite nous irons dîner. (...)

Source : livres-mystiques.com

Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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