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par baudelairec2000 2017-07-02 01:19:31
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je souscris à ce qu'écrit l'ami Rémi: même si je ne partage pas tous vos points de vue: merci, Peregrinus, pour vos posts qui respirent l'intelligence... C'est devenu rare sur le Forum.

Vous avez choisi un angle d'attaque original pour nous parler de la réforme que l'Eglise a entreprise il y a maintenant plus d'un demi siècle: un parallèle entre ces bouleversements sans précédent que nous voyons encore se produire sous nos yeux et la Révolution Française. Il faut dire, vous avez raison, que les réformateurs à l'oeuvre depuis le Concile Vatican II n'ont pas manqué d'insister sur la comparaison: Le Concile a été 1789 dans l'Eglise. Et on pouvait compter sur un certain nombre de commentateurs de sensibilité traditionnaliste, voire sédévacantiste, pour s'emparer de la métaphore.

Vous montrez votre scepticisme dès votre première intervention pour remettre en question cette assimilation simpliste qui consiste à faire des tradis les héritiers des "réfractaires" et les progressistes les descendants du clergé constitutionnel. Je sais que vous n'avez pas terminé votre démonstration - et je ne voudrais pas vous casser la baraque avant que vous ayez achevé la construction de l'édifice - mais tout de même, ne serait-ce que pour dissiper dès à présent cette confusion, n'y a-t-il pas une différence fondamentale entre ces deux processus? Le combat que l'Eglise de France doit mener durant les années 1789- 1801 (voire au-delà pour une minorité, je pense à la Petite Eglise), est une lutte contre un ennemi extérieur, la Révolution, même si celle-ci a trouvé au sein de l'Eglise de nombreuses complicités, à commencer par un courant gallican très influent tout au long du XVIIIe siècle, courant qui inspire la Constitution civile du Clergé et qui sera encore derrière les Articles Organiques. A ce propos, la tendance est de ne parler que du clergé séculier, pourquoi se désintéresser des "Réguliers", ces moines, ces consacrés, dont les esprits éclairés des Lumières ne comprenaient pas qu'ils pussent prononcés des voeux? Le premier acte, terriblement efficace, de la Révolution, c'est d'avoir mis fin aux voeux et, par là même, d'avoir mis la main sur un patrimoine financier considérable. Ceux qui se félicitent de la signature du Concordat oublient que l'accord entre Bonaparte et Pie VII n'a pas envisagé une seule seconde le retour des réguliers en France, ni la moindre question sur les spoliations dont ils furent victimes.

Les bouleversements auxquels nous assistons au sein de l'Eglise depuis le milieu du XXe siècle proviennent,eux, de l'intérieur de l'édifice. Et il étonnant de voir le clergé et les fidèles dans leur grande majorité suivre le mouvement, un mouvement extraordinaire qui conduit à la sécularisation de l'Eglise. Ce que les révolutionnaires accomplirent par la violence, les révolutionnaires en clergy, les innombrables moines défroqués et leurs complices féminins qui voyaient là un moyen de monter à l'autel et d'investir le choeur, l'ont réalisé, somme toute, beaucoup plus pacifiquement: en vidant, au moins pour la France et pour un certain nombre de pays européens, les églises. Il y a dans ce phénomène inoui de déchristianisation de nos sociétés, il y a dans ce mouvement de sécularisation qui ronge l'Eglise de l'intérieur, comme une contamination du catholicisme par les idées révolutionnaires, contamination qui, pour faire simple et non simpliste, commence au XVIIIe siècle par le succès que les idées des Lumières rencontrèrent dans le clergé; l'affaiblissement se poursuit avec l'acceptation du Concordat dont les catholiques français ne virent pas qu'il est était une machine de guerre insidieuse pour mieux les désarmer contre des institutions laïques sûres d'elles-mêmes. Et, pour couronner le tout, comme si la France était un laboratoire grandeur nature, Léon XIII prône du moins le désarmement unilatéral des catholiques face à l'ennemi laïcard, sinon le ralliement à la République dont il ne veut pas voir qu'elle régnera bientôt sur les esprits. D'autres épreuves, notamment deux guerres mondiales provoquées par nos chères démocraties - on ira jusqu'à parler de la croisade des démocraties - l'oubli du politique pour le social, c'est là un des ressorts de la doctrine "sociale" de l'Eglise,
tout cela contribuera à réduire pratiquement à néant les dernières forces de l'Eglise institutionnelle. C'est que les Droits de l'Homme contre lesquels luttèrent les papes du XIX e siècle, au moins jusqu'à Léon XIII, ont fini par percer les murailles de l'Eglise, avec la complicité de ses pasteurs: ce n'est plus à présent que dignité de la personne humaine", que droits fondamentaux de la personne humaine", dont on nous rebat les oreilles, avec les meilleures intentions du monde, comme ce "droit à la vie" qu'on oppose aux partisans de l'avortement; des droits, en tout cas, dont on ne soupçonne pas un instant qu'ils pourraient prendre leur source chez Hobbes. C'est ainsi que le Léviathan, même s'il sort du livre de Job, est devenu sans que beaucoup le réalisent vraiment une source d'inspiration pour nos "pasteurs" - en réalité des loups.

Vous le voyez, il reste à un certain nombre de "tradis" qui se sont risqués à un parallèle entre Vatican II et la Révolution Française, il leur reste à étudier et à comprendre - après, ils pourront peut-être prendre la plume ou un micro - il vous reste beaucoup à dire, sur les origines d'une part de la Révolution Française, de sa lutte contre l'Eglise et des motivations des différents profanateurs à l'oeuvre, et, d'autre part, sur les causes de la Réforme religieuse qui a contribué, plus près de nous, à ébranler durablement l'édifice ecclésial. Aussi faut-il évaluer la part des facteurs internes et externes de ces phénomènes. Je compte sur vous pour nous éclairer.

Un regret cependant: vous choisissez de partir de citations et de parallèles faciles et réducteurs empruntés à des feuilles de choux. Pemettez-moi de penser que cela ne peut qu'affaiblir votre propos. Car, les rédacteurs de ces organes, savent-ils seulement ce qu'est le gallicanisme et ont-ils seulement lu M. Vovelle, T. Tackett, auteurs que vous citez, Bernard Plongeron,remarquable spécialiste du XVIIIe siècle, le père Aulard (sur la Constitution civile du Clergé), Frédéric Bluche, auteur d'un remarquable Danton et d'un ouvrage fondamental sur les massacres de Septembre 1792, livre dans lequel il revient sur la question du serment? Ils auraient intérêt à lire de Pierre de La Gorce, L'Histoire religieuse de la Révolution Française (5 tomes). Passionnant, bien plus que Jean de Viguerie... Ces auteurs passionnants, je ne peux pas tous les citer, nul doute que vous saurez nous les rappeler dans vos contributions à venir.

Cordialement

     

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